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Trace (México, DF)

versión On-line ISSN 2007-2392versión impresa ISSN 0185-6286

Trace (Méx. DF)  no.79 Ciudad de México ene. 2021  Epub 24-Mayo-2021

https://doi.org/10.22134/trace.79.2021.686 

Sección General

Le Mexique et la Gestation Pour Autrui: De l’influence de la culture et de la politique locale dans le marché global

Mexico and Surrogacy: The influence of local culture and politics on the global market

María Eugenia Olavarría Patiño* 

Françoise Lestage** 

*Universidad Autónoma Metropolitana. Unidad Iztapalapa, México, ome@xanum.uam.mx.

**Université de Paris, Francia, francoise.lestage@u-paris.fr.


Résumé.

Cet article, fondé sur les données d’une enquête de terrain réalisée de 2015 à 2017, propose de s’interroger sur les modalités de participation du Mexique à l’ensemble des processus nécessaires à la naissance d’un enfant quand elle se déroule avec plusieurs acteurs dans différents lieux. Il fait l’hypothèse que, pour comprendre le fonctionnement de ce marché mondial, il convient de considérer les conditions et les conjonctures politicosociales locales qui rendent possible le développement de l’offre tout comme sa régulation ou son interdiction, et en propose une analyse.

Mots-clés: Gestation Pour Autrui (GPA); Assistance Médicale à la Procréation (AMP); travail reproductif; Mexique; reproduction stratifiée

Resumen.

Con base en una investigación de campo realizada entre 2015 y 2017, este artículo se pregunta sobre las modalidades de participación de México en el conjunto de procesos necesarios para la procreación de un niño cuando este involucra numerosos actores y diferentes países. Sostiene la hipótesis de que, para comprender el funcionamiento de ese mercado mundial, es importante considerar las condiciones y coyunturas político-sociales que hacen posible tanto el desarrollo de la oferta de gestación subrogada como su regulación o prohibición. Asimismo, propone un análisis interpretativo.

Palabras clave: gestación subrogada; reproducción médicamente asistida; trabajo reproductivo; México; reproducción estratificada

Abstract.

Based on data ethnography carried out from 2015 to 2017, this article proposes to question the modalities of Mexico’s participation in all the processes necessary for the procreation of a child when it takes place with several actors in different places. He supports the hypothesizes that, in order to understand the functioning of this global market, it is necessary to consider the local politico-social conditions and conjunctures which make possible the development of the offer as well as its regulation or its prohibition, and proposes a interpretive analysis.

Keywords: surrogacy; assisted reproductive techniques; reproductive labour; Mexico; stratified reproduction

Introduction

Au début du 21ème siècle, avoir des enfants par Gestation Pour Autrui (GPA), renvoie aux asymétries de l’ordre social global. L’utilisation de la capacité de gestation de personnes des pays du Sud par des parents d’intention de ceux du Nord est devenue possible grâce à de vastes réseaux de mobilité servis par des cliniques et des agences internationales spécialisées. Cette chaîne mondiale du travail reproductif (Tain 2013) concerne l’ensemble des processus et des activités nécessaires pour la naissance d’un enfant qui impliquent des acteurs et des actrices, des corps humains et des techniques provenant de plusieurs pays.

Au Mexique la GPA ne présente pas un seul visage mais constitue un prisme au travers duquel apparaissent des inégalités dans l’accès à l’assistance médicale à la procréation, dans le respect ou pas des droits reproductifs, dans la gratuité ou pas de la gestation, et dans la logique du marché au niveau mondial. De même la GPA s’inscrit dans ce processus et en reproduit les pratiques et les effets, notamment la stratification de la reproduction, avec des particularités qui sont dues aux équilibres et aux enjeux sociaux et politiques mexicains. Celle-ci dépend étroitement de la stratification sociale à l’œuvre dans la société dont elle est le produit et qu’elle contribue à produire.

Cet article centre son analyse sur le Mexique qui s’est inséré dans ce processus mondialisé du côté de l’offre et observe les discussions locales et les circonstances qui ont marqué le passage d’une économie en expansion de 2013 à 2015 à une régulation restrictive en avril 2016 à partir de données ethnographiques de première main collectées au cours d’une enquête réalisée de 2015 à 2017 à Mexico ; à Villahermosa, la capitale du Tabasco, seul État où la GPA était légale ; et dans la région frontalière de Tijuana/San Diego, au nord du pays. Il s’agit d’un travail pionner car l’étude de l’assistance médicale à la procréation et de la gestation pour autrui au Mexique se limite à une dizaine de références bibliographiques dont moins de la moitié correspond à des études socio-anthropologiques telles Esteinou (2012, 151-181) ; Hovav (2016) ; Olavarría (2016), (2018) ; Olavarría et Lestage (2016), ou de géographie humaine (Schurr 2016).

L’équipe de recherche a réuni trois chercheuses seniors, deux chercheurs associés, une post-doctorante et neuf chercheuses en formation. La seconde étape du projet centrée sur l’ethnographie d’un institut privé de fertilité à Mexico et dont les résultats n’ont pas encore été analysés a mobilisé quatre anthropologues. La première étape a permis de recueillir trois types de matériaux : des entretiens qualitatifs de nature ethnographique ; des observations dans des cliniques et des hôpitaux ; et des documents divers (juridiques, législatifs, articles d’acteurs engagés, témoignages sur des forums internet, des chats ou des pages web). Le corpus de témoignages est constitué par 71 entretiens : treize à des médecins spécialistes en biologie de la reproduction, en andrologie ou en pédiatrie ; deux à des travailleurs sociaux dans des hôpitaux ; huit à des avocats de parents d’intention et de cliniques/agences; cinq à des législateurs et des conseillers de groupes législatifs ; quatre à des intermédiaires et gérants d’agences ; dix-neuf à des parents d’intention ; douze à des personnes qui voulaient s’engager dans le processus en offrant leur capacité de gestation ; quatre qui étaient engagées dans une GPA ; quatre ayant mené à bien une GPA une ou plusieurs fois. La plupart ont été enregistrés quand les personnes interrogées l’ont accepté. Dans le cas contraire, ils ont été transcrits simultanément, toujours avec leur consentement. Ce matériel ethnographique a été codifié et classé par une équipe de quinze personnes, étudiants, post-doctorants et chercheurs seniors. L’enquête a été marquée par des modifications substantielles de la législation concernant les techniques d’assistance médicale à la procréation dues à l’évolution du contexte socio-politique au Mexique. Nous avons pu de cette façon observer la période critique au cours de laquelle a été approuvée la première proposition de loi en la matière au niveau fédéral et en mesurer les conséquences immédiates. Le travail de terrain, en particulier à Villahermosa, s’est déroulé alors qu’éclataient plusieurs scandales médiatiques dans la presse écrite, numérique et à la télévision, ce qui a rendu difficile la réalisation d’entretiens avec certains acteurs, mais n’a pas empêché d’enregistrer leurs réactions, opinions et postures dans ces moments critiques. Grâce à l’autorisation des dirigeants et des comités d’éthique et de recherche d’une institution publique du secteur santé et de deux institutions privées consacrées à la fertilité, toutes établies à Mexico, qui apparaissent sous un pseudonyme dans le texte, nous avons pu réaliser des entretiens avec des médecins, gynécologues, biologistes de la reproduction, psychologues et intermédiaires. Les usagers des services et les « donneuses reproductives » ont été rencontrés grâce à la technique de la « boule de neige », à travers les réseaux personnels des médecins et des avocats, mais aussi en sollicitant des hôpitaux et cliniques, en participant à des congrès, forums et séminaires de spécialistes et en réalisant une veille sur des forums internet spécialisés, plateformes qui permettent aux femmes de découvrir l’existence du travail reproductif, que ce soit comme gestatrice ou comme donneuse d’ovule, et en amènent certaines à accepter, à un moment donné, de le devenir elles-mêmes. Un anthropologue à Tabasco, deux licenciés en droit et des membres d’organisations lesbienne-gay-transgenre-transexuel-travesti-bisexuel-intersexuel-queer (LGTTTBIQ) ont également facilité la réalisation des entretiens.

Pour mener à bien la réflexion et saisir les enjeux sociaux et politiques de la nouvelle législation et de ses effets au Mexique, nous resituerons d’abord le cas mexicain dans l’économie mondialisée de la reproduction puis nous montrerons comment le Mexique est passé de la non-régulation à la post-régulation et enfin nous verrons en quoi cette transformation d’un marché de la reproduction a priori global est en fait liée à des conditions et des conjonctures politico-sociales locales.

1. Le Mexique dans l’économie mondialisée de la reproduction

À la lecture des travaux portant sur la GPA, on constate que les processus destinés à permettre la naissance d’un enfant ont suivi des modèles variés selon les pays. Nous faisons l’hypothèse que chacun de ces modèles est lié à une période historique de la GPA, à des espaces géographiques spécifiques et à un type d’approche scientifique particulier développé dans un contexte socio-géo-politique qui détermine les questions qui se posent, faisant apparaître la GPA comme un objet distinct, alors que c’est la grille d’analyse qui change. Nous identifions ainsi quatre modèles : la pratique locale régulée ; l’exil reproductif vers des pays à régulation ; l’exil reproductif vers des pays sans régulation ; le transit post-régulation. Nous les présentons ici afin de montrer comment le Mexique s’y inscrit. Nous soulignerons la spécificité de chacun d’eux en fonction des éléments suivants : la relation entre gestatrices et parents d’intention ; le rôle et le type d’intermédiaires ; le contexte juridique ou légal ; le type de questionnements sociologiques suscités dans une configuration donnée.

Le premier modèle correspond à un circuit d’échange symétrique intra-pays du Nord auquel participent des citoyens de pays où l’État régule l’accès à la GPA, cette régulation constituant une exception de l’usage légal de la GPA dans le monde euro-américain occidental. Aux États-Unis (Ragoné 1994 ; Merchant 2012 ; Jacobson 2016), comme au Canada (Châteauneuf 2011), des agences privées avalisées par l’État gèrent la GPA dont la pratique est régulée sur tout ou partie du territoire. En Israël c’est l’État qui la gère comme partie de sa politique de croissance démographique. Les travaux réalisés dans ce pays se centrent sur le sens des pratiques locales encadrées par une législation très différente de celle du Royaume-Uni, car fondées sur la proximité ethnique et religieuse de la gestatrice et des parents d’intention. De plus, puisque le lien de filiation est établi par la mère, on n’y utilise jamais l’ovocyte de la gestatrice, mais toujours le sperme du père afin d’obtenir la naissance d’enfants génétiquement et biologiquement liés dans des familles hétéro-normées (Teman 2016). Les premières études en sciences sociales sur la GPA ont été menées au Royaume-Uni, pays où a été inventée la Fécondation In Vitro (FIV ) et où, dans les années 1990, on comptait déjà une génération d’enfants nés grâce à la GPA dans un contexte de régulation étatique de régime altruiste entre égaux. Elles ne soulignent pas les inégalités entre gestatrices et parents d’intention mais valorisent le rôle des gestatrices ou s’interrogent sur le bien-être des enfants nés au travers de cette pratique (Blyth 1994, 1995). Des études plus récentes ( Jadva 2016 ; Jadva et al. 2003) centrent leurs interrogations sur l’usage, le sens et les pratiques d’échange et de réciprocité, et beaucoup moins sur la distance sociale éventuelle entre gestatrices et parents d’intention. Bien que plusieurs décennies se soient écoulées entre les unes et les autres, leurs conclusions sont identiques. Dans une étude longitudinale de familles produites par la GPA au Royaume-Uni, Blake (2016) affirme que les familles sont fonctionnelles et les parents affectueux et dévoués. Dans ces travaux, les chercheurs accordent peu d’importance au fait qu’une personne a été sortie du marché du travail pour remplir sa fonction de gestatrice en échange d’une rétribution qui couvre exclusivement les frais inhérents à ce service.

Depuis les années 1990, du fait des restrictions existantes dans leurs pays d’origine ou de résidence (France, Espagne, Allemagne), des personnes et des couples hétéro et homosexuels sont contraints de se rendre dans des pays à régulation afin de contourner les interdits religieux ou légaux pour accéder à la GPA et d’autres technologies médicales. C’est ainsi que se forge un deuxième modèle qualifié de « délocalisation procréative » (Mouly 2014) vers des pays où la pratique de la GPA est régulée. Des études portant sur les parents d’intention français ayant réalisé une GPA aux États-Unis ou au Canada (Delaisi de Parseval 2006 ; Cadoret 2009 ; Courdouriès 2016 ; Gross 2016) montrent que les délocalisations de ce type nécessitent des intermédiaires, mais qu’il peut exister des liens entre gestatrices et parents d’intention. Delaisi de Parseval et Collard (2007) étudient une agence québécoise dans laquelle les gestatrices et les parents d’intention se rencontrent et se rendent visite au cours des ans. La directrice de l’agence est une femme qui, à partir de sa propre expérience comme gestatrice pour autrui, a créé un système dans lequel les gestatrices choisissent les couples qu’elles souhaitent « aider » dans une liste fournie par l’agence. Une telle modalité reflète un échange symétrique Nord-Nord dans des conditions d’égalité.

Favorisée par une demande croissante provenant de certains pays européens, d’Australie et du Japon, mais également de secteurs sociaux ayant un pouvoir d’achat élevé dans les pays fournisseurs de GPA, l’économie de la GPA est marquée par le développement de cliniques de fertilité dans des pays où la régulation est rare ou inexistante, tels l’Inde, le Népal, la Thaïlande et le Cambodge dans le sud-est asiatique, la Géorgie et l’Ukraine en Europe de l’Est et le Mexique en Amérique Latine. Apparaît alors un troisième modèle : celui de la délocalisation procréative vers des pays sans régulation. Dans cet exode orienté Nord-Sud, beaucoup de publications du début du 21ème siècle insistent sur l’inégalité de l’échange - l’exemple emblématique étant l’Inde - et sur la participation des agences internationales, comme dans l’étude de parents d’intention espagnols partant en Géorgie pour accompagner les femmes de ce pays qui portent leurs enfants (Álvarez 2015). Rozée et Sayeed (2014) signalent néanmoins que les études sur cette question sont rares dans les pays du Sud, les travaux de terrain « sporadiques », et soulignent que la plupart des débats sur la GPA se fondent uniquement sur des « prédictions et spéculations » sans base empirique. Il est possible de considérer que dans ces pays, tout comme au Mexique, la pratique de la GPA s’est réalisée dans un cadre que l’on peut qualifier d’a-légal (ni légal ni illégal), dans la mesure où il a été abrité, à un moment donné, par un système libéral qui lui a offert une panoplie de services privés sans règlementation explicite. L’emphase sur les relations d’inégalité entre les gestatrices et les parents d’intention que l’on rencontre dans certains travaux, notamment en Inde, nous conduit à nous interroger sur les asymétries entre pays et régions avant le développement de ce processus mondialisé. Le cas du Mexique montre que les inégalités sont la condition même de l’existence de l’économie de la GPA, et non pas le produit de celle-ci, comme nous le verrons. Autrement dit, c’est parce qu’il y a déjà des inégalités de classe sociale, de race, de genre, ou d’orientation sexuelle au sein d’une société/d’un pays et entre des sociétés/des pays, que cette reproduction stratifiée est possible.

Au bout de deux décennies, l’un après l’autre, les pays fournisseurs de GPA ont mis en place des restrictions légales pour les parents d’intention étrangers ainsi que les couples homosexuels et aux célibataires. C’est le cas de la Thaïlande, de l’Inde, du Népal, du Mexique, du Cambodge et de la Malaisie (Whittaker 2016), qui ont ainsi provoqué une réorientation de l’offre et du flux de demandeurs. Cependant, à l’exception du cas le plus étudié - l’Inde - où seulement un article mentionne que le changement de régime politique vers le nationalisme a favorisé un changement dans la législation, il existe peu d’études qui sont consacrées à la politique des pays qui ont offert, à un moment donné, le service de GPA. En régulant ou en interdisant, les pays du Sud tentent d’esquiver la chaîne mondiale du travail reproductif, produisant une transformation et un déplacement de l’économie de la GPA, alors que les pays auparavant prohibitionnistes (France, Espagne) cherchent à lever la prohibition. Le Mexique est aujourd’hui dans ce moment de la post-régulation qui a été peu analysé pour l’instant pour au moins trois raisons : parce qu’il est apparu récemment ; parce qu’il existe peu d’enquêtes réalisées dans les pays qui offrent la GPA ; et parce que ces travaux sont dominés par une vision théorique externe éloignée du contexte local (Schurr 2016). C’est pourquoi nous voulons centrer notre réflexion sur le contexte local mexicain. En effet, si certains chercheurs ont fait l’hypothèse que la proximité du Mexique et des États-Unis, ajoutée aux nombreuses connexions aériennes et à l’infrastructure touristique de la zone de Cancun, ont joué un rôle de premier plan dans la croissance du marché de la GPA de 2013 à 2015, nous estimons que le développement de cette économie s’explique tout autant par l’équilibre des forces entre les groupes politiques locaux que par des éléments culturels spécifiques comme nous allons le montrer dans la deuxième partie.

2. Un Eden reproductif

Dire du cas mexicain qu’il fait partie de la chaîne mondiale du travail reproductif implique d’en appréhender le cercle complet qui va du paradis reproductif non régulé à la prohibition, c’est-à-dire l’avant et l’après du tournant pris en 2015-2016 au Mexique, la polémique qui a accompagné le changement de régulation et les effets qu’un tel mouvement a entraînés dans l’accès à l’assistance médicale à la procréation et sur les droits reproductifs.

Depuis qu’en 1997, la modification de deux articles du Code civil de l’État de Tabasco a permis de reconnaître la validité des contrats de substitution utérine, de nombreux services d’assistance médicale à la procréation (allant de l’insémination artificielle au choix du sexe, en passant par l’Injection Intracytoplasmisque de Spermatozoïdes (ICSI) et la Fécondation In Vitro (FIV ), ont été proposés à des parents d’intention de toute nationalité, âge et orientation sexuelle. De 1997 à 2015 l’opération était réalisée indifféremment à Mexico ou à Villahermosa, là où l’infrastructure médicale et technique était garantie, mais la naissance était enregistrée dans l’État de Tabasco, principalement dans la capitale, Villahermosa. Le centre touristique de Cancun s’est ensuite ajouté à ce réseau de cliniques et d’agences, incluant en quelques années le Mexique dans le circuit international de l’assistance médicale à la procréation.

Jusqu’à fin 2015, les cliniques de fertilité situées à Villahermosa collaboraient avec leurs sièges ou leurs succursales installées à Mexico ou à Cancun, et offraient également des services d’hébergement, de transport et de traduction, ainsi que des voyages organisés vers Cancun ou d’autres destinations touristiques, développant ainsi une économie liée à l’assistance médicale à la procréation dans la région du sud-est et des Caraïbes mexicaines. Cette économie s’est construite grâce aux connexions aériennes et à l’infrastructure hôtelière existante, des avantages que le Mexique offrait, à l’époque, face à des pays comme la Thaïlande ou l’Inde ayant commencé à réguler la GPA.

Il n’y a pas de recensement officiel d’offre de la reproduction assistée dans l’État de Tabasco et il serait inutile de tenter de le mener à bien à cause de la différente labellisation des établissements médicaux (cliniques, hôpitaux et cabinets médicaux indépendants). Cependant, le passant qui circule à Villahermosa ne peut que remarquer la vingtaine de cliniques de fertilité situées dans les avenues les plus en vue et les centres commerciaux (Carnet de terrain 2015) dans une ville qui compte seulement 684 847 habitants (INEGI 2016). Douze des cliniques visitées pendant l’enquête avaient leur propre « programme de GPA », c’est-à-dire un système de recrutement et de sélection qui leur permettait de mettre en contact des gestatrices potentielles avec les parents d’intention mexicains ou étrangers par l’intermédiaire de psychologues et de travailleurs sociaux. En plus de ces programmes, depuis 2013, au moins deux agences de GPA connues au niveau international, avaient leur siège à Villahermosa.

Dans ce contexte de grande permissivité légale, les médecins spécialistes en biologie de la reproduction, propriétaires ou directeurs des cliniques, ont offert leurs services en suivant des principes éthiques individuels, le plus fréquent étant d’éviter de faire de la gestatrice la mère génétique, afin de protéger l’exercice de leur travail et tout le système de travailleurs sociaux, psychologues et avocats qui les entourent, de réclamations possibles de la part de gestatrices qui seraient aussi les mères génétiques. Dans un entretien réalisé à Mexico en 2015, le docteur Galindo, médecin spécialiste en biologie de la reproduction, remarque que la GPA traditionnelle (quand la gestatrice apporte aussi l’ovule) « n’est pas recommandée par la littérature ». De même les gestatrices interviewées affirment leur refus de donner un enfant génétique ou même leurs ovules. Paola raconte ainsi : « des couples homosexuels m’ont demandé d’être gestatrice et donneuse d’ovule, et c’est pour ça que j’ai refusé leur offre parce que là, oui, ils auraient eu mon bagage génétique, alors oui ce serait mes enfants, et moi je veux juste être une incubatrice (…), ma famille me soutient tant que je ne donne pas d’ovule ». Le dialogue qui suit avec la présidente de la Fondation/clinique Graciela García montre la rigueur avec laquelle cette règle est appliquée :

« Anthropologue : vous utilisez le matériel génétique de la gestatrice ?

Graciela García : Jamais, non jamais ! C’est un engagement complètement dif-férent. Ça pourrait se faire entre particuliers, nous, nous ne le faisons pas. C’est précisément comme ça que la GPA complète se différencie de la GPA traditionnelle. La GPA complète substitue uniquement le ventre, rien de plus. La GPA traditionnelle peut se faire avec le matériel génétique de la fille […] » (Carnet de terrain 2015).

Cette offre d’Assistance Médicale à la Procréation a été utilisée en premier lieu par des usagers mexicains de haut niveau économique et par des célibataires ou des couples hétérosexuels et homosexuels venant de pays où la GPA était interdite tels l’Espagne, l’Allemagne et l’Italie. Elle l’a été ensuite par des usagers de pays comme les États-Unis et l’Argentine, attirés par de meilleurs coûts et par la facilité du voyage. Le Docteur Pablo Sanjuan, responsable des processus médicaux de GPA dans une clinique privée de Mexico indique :

« Il y a eu beaucoup de demandes au niveau mondial ; beaucoup de couples européens et nord-américains recherchent ce service. Dans leurs pays du premier monde, la législation est mieux faite et tout est organisé, tout est bien plus simple. Il y a quelque chose qui s’appelle ‘Bébé clés en mains’ où tu arrives, tu laisses ton échantillon de sperme, et neuf mois plus tard tu reviens et la clinique a tout fait. Toi tu viens seulement pour récupérer le bébé et tu n’es au courant de rien […] Ce qui était intéressant au Mexique, c’est que c’était beaucoup moins cher, mais beaucoup plus difficile du point de vue des démarches à faire. C’est pour ça que ça n’a pas tellement marché. » (Carnet de terrain 2017).

Le séjour au Mexique des parents d’intention venant de l’étranger ne correspondait pas à la durée du processus, encore moins à la grossesse puisque, comme l’expliquait le même médecin spécialiste, tout était délocalisé, y compris la participation des médecins :

« Eux (les usagers) cherchaient un profil de donatrice particulier, et bon, normalement c’était des filles étrangères, nord-américaines, canadiennes, sud-africaines. Alors ils payaient les frais de voyage des filles et elles venaient ici avec moi, et je faisais toute la partie reproductive : la stimulation, l’extraction des ovules. […] C’est ici qu’on fécondait les embryons ; et ces petits embryons se transféraient aux filles qui venaient de la clinique de Tabasco. Notre associé à Tabasco s’occupait de la gestatrice. Il vérifiait que tout allait bien avec elle, il formalisait le contrat avec le notaire et tout ça, et alors à ce moment-là, on provoquait la rencontre du couple qui avait besoin du traitement avec la gestatrice qui était embauchée pour ça, et la gestatrice venait à Mexico prête pour l’implantation. Elle arrivait un jour, on faisait le transfert ce même jour ou le lendemain et elle repartait à Tabasco […] où elle était suivie pendant toute la grossesse par notre associé là-bas… » (Dr. Sanjuán, carnet de terrain 2017).

Ce témoignage synthétise le processus de délocalisation procréative qui s’est développé au Mexique jusqu’en 2015. On y apprend comment fonctionnait la mobilité des parents d’intention, des donneuses d’ovules et de gestation. On y apprend aussi que leur recherche de GPA au Mexique ne se limitait pas à employer une gestatrice, mais concernait un service plus complet, incluant gamètes, gestation, services médicaux, laboratoires et avocats, fourni par un réseau formé par des cliniques et des agences de plusieurs pays. On découvre par ailleurs que certains parents avaient des exigences concernant le profil de la gestatrice:

« Nous avons eu des couples européens, nord-américains et mexicains. Ils demandent souvent que la mère porteuse leur ressemble, avec des yeux clairs, ou la peau blanche, même si les embryons n’ont rien à voir avec elle » (Livia López, médiatrice de la fondation/clinique, carnet de terrain 2015).

C’est grâce au contact personnel et à l’usage d’internet que la GPA a pu être présentée comme une activité rémunérée éventuelle à des Mexicaines de classe moyenne basse, ayant un niveau de scolarité niveau bac ou université, la plupart mariées et mères de famille. Livia, médiatrice de la fondation/clinique nous fait part de l’information qu’elle envoie par courrier électronique aux jeunes femmes qui la contactent via la page internet :

« Nous sommes une clinique de fertilité et de reproduction assistée très sérieuse et nous exigeons la même chose. Nous avons des contrats légaux pour les deux parties. C’est pour cela que je suis intéressée par les filles qui veulent aider les couples qui ne peuvent pas avoir d’enfants pour différentes raisons. Si tu veux louer ton ventre, il faut que tu aies entre 18 et 35 ans, que tu sois sans surpoids, que tu aies déjà eu des grossesses ou des avortements provoqués ou involontaires, avec une césarienne au maximum (Attention : seulement pour l’État de Mexico, le District Fédéral et Villahermosa, Tabasco, ou maximum à 2 heures de distance). Le paiement est de 170 000 pesos mexicains en plusieurs fois). » (Livia López, médiatrice de la fondation/clinique, carnet de terrain 2015).

Lorsqu’une jeune femme répondait à son message, Livia lui fournissait plus de données et elles avaient une conversation téléphonique au cours de laquelle Livia informait la jeune femme sur le début du processus qui consistait en une visite médicale et un entretien avec une psychologue. Ces gestatrices ont parfois un emploi, mais elles sont vulnérabilisées par la conjoncture socio-politique (elles ont été victimes de déplacements dus à la violence qui sévit dans plusieurs régions du Mexique) ou économique (elles ont des dettes à payer, un logement à améliorer). Quoi qu’il en soit, la distance sociale, culturelle et ethnique entre les gestatrices et les parents d’intention reste significative, de telle sorte que l’on peut dire que la GPA rend possible l’appropriation de la capacité gestatrice de femmes de classes populaires et moyennes par des personnes ayant des revenus élevés, ou que les premières participent comme force de travail reproductive dans le système de reproduction stratifié. Le cas du Mexique montre tout à la fois une hiérarchisation interne au pays permettant aux seules classes privilégiées de postuler à une GPA et cantonnant les femmes des classes moyennes et populaires au rôle de gestatrices de substitution et une hiérarchisation internationale qui faisait du Mexique un lieu possible de GPA pour tous les parents d’intention de classes privilégiées des pays riches.

La plupart des gestatrices interviewées ont réalisé la GPA dans le cadre d’un contrat rédigé par un spécialiste légal. Ce spécialiste pouvait être un avocat employé par les cliniques/agences, ou un conseiller dans l’exercice indépendant de sa profession, qui définissait les termes dans lesquels se réalisaient la gestation, l’accouchement et le don de l’enfant, ainsi que l’établissement des prestations et contreprestations entre parents d’intention, cliniques/agences et gestatrices. Les avocats et juristes interviewés se sont dits préoccupés par plusieurs aspects de la procédure, notamment le fait que le pouvoir politique n’a pas favorisé un échange plus symétrique entre gestatrices et parents d’intention et n’a pas non plus donné de statut légal aux cellules germinales ou à l’ovule fécondé (Entretien avocats Nelson Campos et Emilio Manrique 2015). Ils ont exprimé la nécessité de combler les vides légaux qui ont généré des abus potentiels de la part des cliniques et favorisé l’exploitation des femmes. L’avocat Nelson Campos, spécialisé dans l’élaboration d’accords de GPA, nous a précisé:

« Tu sais ce que je proposerais ? Que les filles elles-mêmes forment une association, comme un syndicat. Pourquoi c’est la clinique qui décide ce qu’elle va payer aux filles ? […] Oublie les cliniques, les agences, parce qu’il y a des propriétaires d’agences qui sont millionnaires en vendant ces gamines ! Qui sont-ils ? Pourquoi disposent-t-ils des corps des filles ? Là oui, il y a traite, elles sont commercialisées. Si la fille dit : ‘d’accord, je vais t’aider, mais donne-moi une compensation’ et si ce n’est pas une compensation suffisante, il faut qu’elle puisse décider, que personne ne l’oblige, qu’elle puisse elle-même établir le prix. » (Nelson Campos, carnet de terrain 2015).

De leur côté, les cliniques/agences établissaient les conditions que devaient remplir les gestatrices en termes de santé, d’âge et, parfois, d’apparence physique. Elles réalisaient les examens médicaux et psychologiques qu’elles considéraient nécessaires et imposaient toutes les exigences qui leur semblaient pertinentes, comme par exemple, ne pas avoir de casier judiciaire, ne pas avoir été victime de violence domestique, ne pas être « une femme de mœurs légères » (promiscua) et, dans certains cas, ne pas avoir de tatouages ou de perforations corporelles. Inversement, les cliniques / agences valorisaient deux éléments fondamentaux : d’une part, être déjà mère et vivre entourée d’un groupe familial stable ; d’autre part, avoir des croyances religieuses. Un des signes que les intermédiaires considéraient comme un indicateur de la façon dont la gestatrice allait mener la grossesse était également la propreté et l’apparence de ses enfants :

« Si on voit qu’ils sont propres, qu’ils mangent bien, qu’ils vont à l’école, ce genre de choses est important […] Nous n’avons pas besoin d’un niveau minimum de scolarité, souvent on a des filles qui n’ont pas été au collège. La plupart sont informées par Internet. C’est une sorte de filtre. Au moins elles ont Facebook. La connexion n’a pas d’importance, mais ça te garantit quelque chose. » (Graciela Garcia, fondation-agence, carnet de terrain 2015).

Le contrat de GPA établissait les termes du paiement - dont était décompté le coût des examens - et pouvait être parfois renouvelé chaque mois. Le contrat n’était considéré valable qu’après, au maximum, trois tentatives d’implantation de l’ovule fécondé. Pendant cette période, la relation entre la gestatrice et les parents d’intention restait distante socialement et physiquement. De même était-il recommandé par les cliniques/agences d’éviter tout lien physique entre le nouveau-né et la gestatrice. C’est pourquoi la naissance avait lieu par césarienne et l’allaitement restait exceptionnel. Quand les gestatrices étaient mariées, elles conservaient le droit à interrompre la grossesse jusqu’à la douzième semaine. À la naissance de l’enfant, leurs époux devaient renoncer à la paternité par un jugement légal.

L’ethnographie du cas mexicain pendant la période ayant précédé la régulation nous permet de brosser les traits d’un système de reproduction stratifiée qui s’est développé grâce à un vide légal, pour satisfaire la demande internationale, en excluant la plus grande partie de la population locale et sans rien lui apporter. Il n’a pas davantage permis d’étendre les droits reproductifs à d’autres populations, pas plus qu’il n’a développé la technologie ou la recherche biomédicale.

3. La polémique

En 2014 et 2015, la presse mexicaine a rapporté deux cas de citoyens espagnols bloqués au Mexique parce qu’ils ne pouvaient pas obtenir de passeport pour leurs enfants nés de gestatrices mexicaines. En février 2015, la note publiée dans le quotidien El País, sur Luis et Antonio, un couple qui avait passé sept mois entre Tabasco et Cancún (Calderon 2015), fut le détonateur des propositions de loi prohibitionnistes. Des reportages transmis lors de journaux télévisés ayant une large audience au Mexique ont aussi pris pour cible la GPA, en indiquant cette pratique était devenue une affaire mercantile au cours des deux dernières années (Noticieros Televisa 2017). Dans le reportage, des membres du parlement de Tabasco et des médecins se déclaraient favorables à la régulation afin que la GPA ne « devienne pas une industrie et soulignaient qu’un nombre disproportionné d’étrangers » recouraient à cette pratique au Mexique (ibid.). Le thème de la GPA dans l’État de Tabasco a alors fait l’objet d’une polémique médiatique, législative et publique au cours de laquelle les acteurs ont exprimé des positions allant de la prohibition à la pénalisation, en passant par la régulation.

La principale opposition à la GPA est venue de groupes conservateurs du parti de centre droit au pouvoir, le Parti Révolutionnaire Institutionnel (PRI) et du parti d’opposition de droite, le Parti d’Action Nationale (PAN). Tous ont exprimé, chacun à leur façon, leur position critique face à l’interruption volontaire de grossesse et le mariage pour tous. Quant à l’Église catholique, très puissante au Mexique, et aux groupes Pro-Vie, étroitement liés, ils s’opposaient en bloc, à l’avortement, au mariage égalitaire et à la GPA. Le livre Maternité pour autrui. Exploitation des Femmes à des Fins de Reproduction (EMFR) (Bartolini et al. 2014) présente une synthèse de la posture de ces groupes opposés à la GPA. Cet ouvrage a fourni la substance de la proposition de décret à la Loi Générale de la Santé présentée par le Parti Révolutionnaire Institutionnel devant le Sénat en 2015, proposition qui n’a pas été approuvée. L’organisation «Exploitation des femmes à des fins de reproduction » regroupe des opposants à la GPA dont l’argument principal est de mettre sur un pied d’égalité GPA et activité criminelle de traite de personnes. De 2014 à 2016, cette organisation a mené une campagne antiGPA dans le métro en plaçant des affiches contre la GPA , et a diffusé ses idées via le réseau social Twitter avec l’hashtag #ExplotacióndeMujeresconFinesReproductivos.

Face à ces positions radicales contre la pratique de la GPA au Mexique, des médecins et des juristes favorables à une régulation, ont proposé que ce soit les experts qui déterminent la procédure et non les politiques. La Commission Nationale des Droits de l’Homme a influencé le processus en organisant des forums et des tables-rondes sur le sujet. Des conseillers de l’UNICEF et de l’ONU, spécialistes en droits de l’enfant, cherchant à prévenir les abus, ont eux aussi été associés au projet d’élaboration d’une norme officielle régulant les aspects éthiques et médicaux de la GPA. Dans deux documents traitant de l’assistance médicale à la procréation, de la GPA et des droits reproductifs, le Groupe féministe d’information pour la reproduction choisie (GIRE) analyse le cadre de la GPA dans le monde et au Mexique, expose des cas emblématiques, recense les législations et les codes civils des états fédérés présentant des aspects conflictuels, et fait des recommandations pour une régulation respectant les droits reproductifs (2017). Les principales propositions du Groupe sont la reconnaissance de droits pour l’embryon et les ovules fécondés, et l’opposition à la limitation à l’accès à l’assistance médicale à la procréation et à la discrimination de certaines catégories de parents d’intention.

Tout au long de l’année 2015, et jusqu’en mars 2016, plusieurs actions législatives ont vu le jour sans tenir compte des recommandations des forums de discussion et de la Commission Genre et Equité du Ministère de la Santé ; finalement, le Sénat mexicain a proposé une loi dont la version modifiée a été approuvée le 26 avril 2016.

« Le 26 avril 2016, le Sénat mexicain vote, à la quasi-unanimité, la réforme de la Loi Générale de la Santé. Cette réforme autorise la GPA sans but lucratif uniquement pour les couples hétérosexuels de nationalité mexicaine et sur indication médicale. De plus, des peines de prison et des amendes sont prévues pour toute personne qui paierait une femme pour louer son ventre ou qui la persuaderait, par la violence ou en utilisant sa situation économique, de faire un enfant et de le donner à des tiers en renonçant à ses droits maternels. Quant au personnel médical qui participerait à une GPA à des fins lucratives, la loi prévoit la suspension de leur droit à exercer la médecine pendant un délai de cinq à huit ans. » (Roldán 2016).

Cette réforme est le résultat d’une négociation entre les acteurs politiques et religieux, dans la mesure où elle régule certains aspects de la GPA, tels que le contrat devant notaire ou le paiement des frais médicaux pour la gestatrice, mais interdit sa pratique à des fins lucratives et en exclut les homosexuels, les célibataires et les personnes ayant dépassé l’âge de la reproduction. Elle provoque ainsi une nouvelle forme d’exclusion, fondée cette fois sur des critères moraux, d’un autre secteur de la population mexicaine qui inclut les minorités sexuelles et les personnes qui se trouvent en situation « d’infertilité relationnelle » (Instituto Interamericano de Derechos Humanos 2008) et plus seulement biologique.

En établissant que seule une femme parente du couple demandeur peut être gestatrice - ce qui démontre la volonté d’enfermer la GPA dans la famille hétérosexuelle instituée par mariage par l’État et l’Église - cette réforme produit une troisième forme d’exclusion : celle des éventuelles gestatrices qui ne sont pas apparentées aux parents d’intention. Elle entraîne ainsi une plus grande vulnérabilité des gestatrices en limitant ce rôle à des membres de la famille d’un des parents d’intention, ce qui suppose des liens de dépendance, et éventuellement d’exploitation, en particulier dans la société mexicaine où la notion de parent peut inclure des personnes de différents niveaux sociaux. Par ailleurs, elle éloigne encore davantage les gestatrices potentielles d’une reconnaissance de leur activité comme un travail et les contraint à accepter des conditions qui leur sont préjudiciables sous le prétexte que tout se passe entre parents.

Pourquoi la rhétorique qui a entouré la proposition de loi pose-t-elle question ? Parce qu’au Mexique, comme en Inde, la régulation de la GPA a consisté à passer d’un système commercial à un système dit « altruiste », réservé à une catégorie de couples/parents d’intention hétérosexuels, mexicains et mariés. Interdire la GPA régulée par le marché a laissé des centaines ou des milliers de gestatrices potentielles sans aucune protection et ouvert la voie à la possibilité que des parentes pauvres ou des employées domestiques soient obligées d’accepter des conditions d’exploitation encore plus graves que celles qui existaient avant la promulgation de la réforme. La condition d’altruisme des gestatrices qui est exigée dans la loi mexicaine - de même que dans les lois canadiennes et, d’une certaine façon, dans celles de plusieurs états des États-Unis (Merchant 2016) - ne tient pas compte du fait que la grossesse, les analyses et opérations préalables à l’implantation de l’embryon ainsi que le post-partum empêchent la gestatrice d’exercer un emploi fixe pour une période allant de trois mois à un an. Bref, la GPA n’est pas vue comme une forme de travail, que ce soit un travail « par amour » ( Jacobson 2016), émotionnel (Nieto 2017), « un travail clinique », ou un « travail reproductif » (Tain 2013), notions qui peuvent servir à désigner les activités liées à la fabrication d’un enfant au moyen de la biotechnologie dans le contexte actuel de la mondialisation (Courduriès et Herbrand 2014).

4. Les effets de la réforme de loi du 26 avril 2016

Nous constatons que la réforme de loi du 26 avril 2016 a eu différents effets : elle a généré des complications pour les parents d’intention et pour les gestatrices, la disparition des intermédiaires au Mexique au profit du corps médical, et le déplacement des cliniques et des gestatrices vers d’autres circuits au Mexique, ou des usagers vers d’autres pays.

Des diff icultés pour les parents d’intention et pour les gestatrices

En 2017, la Cour Suprême de Justice de la Nation a reçu les premières contestations judiciaires qui ont permis de revenir sur les aspects les plus problématiques de la loi. Dix-huit mois plus tard, elle statuait sur l’inconstitutionnalité des demandes d’âge et d’état civil que devaient fournir les femmes en attente d’assistance médicale à la procréation, parce qu’ils ne respectaient pas les principes d’égalité et de non-discrimination. Cependant, l’accès à la gestation pour autrui reste réservé aux citoyens et citoyennes mexicains (Mosso 2017).

En opposant les modalités altruiste et rémunérée de la GPA et en interdisant la seconde, l’ordonnance de 2016 ne prend pas en compte les conditions ni les perceptions des actrices principales. Surtout, cette ordonnance aggrave encore davantage la situation de vulnérabilité des femmes en les empêchant de percevoir

une rémunération pendant leur grossesse alors qu’elles ne pourront pas se maintenir dans le marché du travail, comme le souligne Rudrappa (2014) dans le cas de la ville de Bangalore.

À propos des conséquences des réformes à la législation, Naomi (34 ans, diplômée en communication, célibataire, sans enfant), gestante d’une fillette pour un couple allemand gay, pense que :

« Ils ont mal fait les choses et voilà les conséquences […]. Je crois que nous avons tous le droit d’être parents quand nous le désirons. Pour moi, il faut légiférer depuis la base, créer un profil de la gestatrice et de ceux qui veulent être parents, sans tenir compte de la position économique ou du type de couple, mais seulement de leur capacité à élever un enfant, de leur apport futur à la société. Pour moi, c’est ça le but de la famille : former ensemble une meilleure société. Et de là remonter vers le haut : droits et obligations des deux parties, tout comme légiférer et surveiller ceux qui offrent le service médical. » (Naomi 2016).

Esther (28 ans, contrôleuse de sécurité et d’hygiène dans l’industrie, divorcée, mère de deux enfants, gestatrice) estime que :

« Les étrangers, les gays et les célibataires n’ont pas le droit de louer un ventre. Ce sont des choses totalement illégales et discriminantes. Je sais que la plupart de ceux qui envisagent une GPA ont déjà essayé d’adopter mais ils n’ont pas réussi. Et je crois que si on faisait passer des tests à tous ceux qui ont des enfants, on penserait que beaucoup d’entre eux ne devraient pas être parents, et pourtant ils élèvent leurs enfants comme il faut sur plusieurs points. Si on facilitait l’adoption, les GPA diminueraient. » (Esther 2016).

La loi de 2016 a de cette façon placé les couples qui recherchent une gestatrice dans une situation difficile, en leur imposant des critères impossibles à respecter, comme celui d’avoir une parente jeune et saine disposée à porter leur enfant de façon altruiste.

La disparition des intermédiaires au profit du corps médical

Dans ce nouveau contexte, c’est le médecin qui choisit les donneuses reproductives. Celles-ci ne doivent avoir aucun contact avec les parents d’intention. Dans un article paru précédemment, Olavarría (2018, 320) rapporte le cas de Vania et Julián qu’elle a interwievés, qui n’ont pas pu suivre le développement de leur fille dans le ventre de sa « mère prêtée », comme le dit Vania en parlant de la gestatrice, pas plus qu’ils ne sont intervenus dans le choix de la donneuse d’ovule. Leur participation dans le processus a consisté à apporter le gamète masculin, à suivre la fécondation et la grossesse à travers le médecin et à payer le coût de la procédure, qui s’est élevé à cinq cent soixante-dix mille pesos mexicains, soit environ trente mille dollars américains.

Cette façon à moitié clandestine de procéder transmet à toutes les parties un sentiment de vulnérabilité. De plus, le médecin justifie ses choix « pour des raisons de sécurité ». Que doit-on comprendre par-là ? Que bien que régies par des principes juridiques, certaines pratiques se développent en marge de l’État. Ce n’est plus alors l’État qui ne remplit pas sa fonction de protéger ses citoyens, mais les travailleuses de la reproduction qui « représentent un risque ».

En criminalisant les médiateurs, la loi actuelle a transformé les médecins en intermédiaires, ce qui a entraîné de nombreuses dérives. Les donneuses d’ovules et de gestation, incorporées avant 2016 au circuit du don reproductif par des agences et des fondations, sont aujourd’hui recrutées par les médecins dans leur entourage professionnel, qui transgressent ainsi les directives générales explicites de la pratique de la GPA au niveau mondial. Une des femmes que nous avons interrogées signale ainsi que « beaucoup de gestatrices sont des étudiantes en médecine qui ont besoin d’argent ».

Le déplacement vers d’autres circuits au Mexique, ou vers d’autres pays

De plus, la réforme à la loi mexicaine s’est traduite par un déplacement géographique au niveau local et au niveau global. Suite à la réforme, l’État de Tabasco a perdu son statut d’Eden reproductif, entraînant le déplacement du circuit de la délocalisation procréative vers des cliniques établies dans d’autres lieux touristiques du Mexique, comme Puerto Vallarta sur la côte Pacifique qui font profil bas quant au recrutement de gestatrices potentielles. Les procédures de stimulation hormonale et de fiv se réalisent aujourd’hui à Mexico et dans cette zone touristique aux nombreuses liaisons aériennes avec la côte ouest des États-Unis et le Canada où partent les gestatrices. Si l’offre s’est réduite pour elles, le gain a augmenté - de dix-quinze mille dollars américains à trente mille - mais elles doivent accoucher en Californie. Dans les chats et forums internet qui, il y a quelques mois encore, captaient l’intérêt des femmes mexicaines remplissant les conditions de santé et d’âge pour être gestatrice pour autrui, on demande aujourd’hui d’avoir aussi un visa pour entrer aux États-Unis et la disponibilité pour voyager en Californie. Cette exigence réduit considérablement le nombre de gestatrices potentielles dans la mesure où il est très difficile pour les Mexicaines de classe modeste d’obtenir un visa de tourisme ou de travail pour les États-Unis. Cette difficulté peut transformer ces gestatrices en migrantes condamnées à l’informalité et à la clandestinité.

Au niveau global, les réformes légales ont modifié la participation du Mexique dans l’économie de l’assistance médicale à la procréation. Les régulations juridiques du Mexique ont produit des effets limités par la force du marché et conduit, à rediriger des usagers possibles vers d’autres pays (Cambodge, Ukraine) ou à ouvrir de nouveaux marchés tel le Ghana (Gerrits 2016). Ces changements répondent aux lois du marché au niveau mondial qui se poursuit mais sans le Mexique. Ces réformes ont donc produit un tournant au niveau régional car le pays offre toujours, localement, une force de travail reproductive comme on le constate dans les pages internet qui annoncent : « La GPA au Mexique, c’est mieux que jamais ! » ou encore « la GPA au Mexique est maintenant limitée… mais pas terminée » . Sur le site web Sensible Surrogacy, on lit ainsi les informations suivantes concernant la pratique de la GPA au Mexique :

« De nouvelles lois concernant la régulation de la gestation pour autrui au Mexique ont été votées. En conséquence, un programme complet de GPA n’est plus possible pour la plupart des couples. Mais la fin de cette possibilité au Mexique a entraîné de nouvelles opportunités aux États-Unis. Pour tous les parents d’intention, la GPA est une option en utilisant les cliniques mexicaines de FIV avec des gestatrices de substitution des États-Unis. Cette option permet aux cliniques mexicaines de concevoir l’embryon et d’initier la grossesse alors que des spécialistes de pré-natalité et des hôpitaux obstétriques aux États-Unis s’occupent du reste de la grossesse et de la remise du bébé. Le résultat est un programme alliant tous les bénéfices de la GPA américaine (des lois favorables à la GPA, la citoyenneté américaine pour le bébé) mais à un prix plus abordable. Pour les couples qui recherchent une option encore plus bon marché, il y a encore d’excellentes options possibles pour ceux qui sont prêts à commencer leur voyage de GPA outre-mer. Sensible Surrogacy travaille avec d’excellentes cliniques de fiv dans de nombreux pays, et nous serons heureux de vous offrir ces possibilités. »

Une participation d’un autre ordre à la chaîne mondiale du travail reproductif ?

Depuis avril 2016, des évènements liés à l’assistance médicale à la procréation ont placé à nouveau le Mexique en première page des journaux du monde entier. L’un concerne la naissance dans ce pays, en septembre 2016, du premier bébé engendré par la technique dite « à trois parents », car elle utilise l’ADN de trois personnes (Favereau 2016; Salas 2016). Résumons l’affaire en quelques mots. Une équipe de médecins américains a implanté l’ADN du père et de la mère dans un ovocyte provenant d’une donneuse dont l’ADN avait été enlevé, pour que l’enfant n’hérite pas d’une maladie génétique de sa mère, le syndrome de Leigh, maladie dont les deux précédents enfants du couple avaient hérité. Dans un article du journal espagnol El País, le journaliste insiste sur le fait que l’opération a été réalisée non pas aux États-Unis, où elle est interdite, mais au Mexique « …‘Si on avait fait quelque chose comme ça en Espagne, les médecins auraient été emprisonnés’ (…) ‘En réalisant ce traitement au Mexique, l’équipe n’était pas assujettie à la même régulation rigoureuse qui existe dans d’autres pays’, assure le spécialiste Dusko Ilic, du King’s College de Londres (…). Les lois qui ont été proposées cette dernière décennie, même si elles n’ont pas été approuvées ni votées, établissent que la manipulation humaine des embryons est possible uniquement si les couples sont stériles ou ont des problèmes de stérilité, mais ne peut pas servir à réaliser des changements génétiques pour prévenir la transmission des maladies des parents aux enfants (ibid.). »

On voit ici que la réforme d’avril 2016 n’empêche pas le Mexique d’être encore un paradis de la reproduction. En revanche, la recherche scientifique du pays en pâtit. En octobre 2016, plus de soixante scientifiques mexicains ont publié un manifeste dans lequel ils signalent que « les restrictions du tourisme reproductif prospère qui laisse, par ailleurs, sans protection les gestatrices » interdit la recherche sur les embryons humains et sur leur création pour tout autre but que reproductif. Le médecin Canales de la Fuente en conclut : « Nous devons voter une loi complètement différente de celle-là, avec une base scientifique et médicale - et elle doit venir du ministre de la Santé, pas des députés » (Reardon 2016).

Conclusion

Pour conclure, nous reviendrons sur deux éléments qui caractérisent la GPA au Mexique et soulignent le poids des sociétés locales dans leurs dimensions culturelle, sociale et politique dans le marché global : d’une part, la façon dont l’économie de la GPA reproduit les hiérarchies sociales existantes et fabrique plusieurs types d’exclusions ; d’autre part, le poids du contexte socio-politique local dans l’évolution de l’économie de la GPA au Mexique.

  1. Au niveau mondial, le Mexique a occupé une place de pourvoyeur de donatrices reproductives. Nous avons montré que cela a été clairement le cas jusqu’en 2015, quand le marché lancé par les cliniques/agences fonctionnait avec des médiateurs qui mettaient en contact des gestatrices locales de classe populaire ou classe moyenne et des parents d’intention, médecins et avocats de classes aisées mexicaines et de pays riches. Depuis 2016, cela a continué avec des parents d’intention aisés mexicains, sous l’unique contrôle de l’appareil médical. Ainsi la GPA apparaît tout à fait liée à la stratification sociale en vigueur dans le pays. Même si, jusqu’en 2015, les gestatrices ne venaient pas des milieux les plus marginalisés et possédaient un niveau d’éducation primaire ou secondaire, parfois même un emploi, leur décision de s’engager dans cette pratique se devait à la conjoncture : conjoncture juridique pour les femmes vivant dans le Tabasco, unique État du pays où il était légal de céder l’enfant aux parents d’intention ; conjoncture socio-politique pour les femmes expulsées de leur région d’origine par la violence ; conjoncture économique pour les femmes ayant un emploi mais un salaire peu élevé. On constate donc que le développement du marché international de la GPA au Mexique fait écho aux questionnements des sciences sociales sur les inégalités de genre, sexe et classe, dans le domaine de la constitution de la famille et de la parentalité. Depuis qu’il est inscrit dans la loi, ce dispositif - qui fait aller la force de travail reproductive du bas vers le haut de la société - est devenu légitime, dévoilant ainsi la conception qu’en a l’État. Non seulement l’économie de la GPA au Mexique reproduit les hiérarchies sociales mais elle exclut certaines catégories de personnes ou de couples, que ce soit avant ou après la réforme de la loi. Jusqu’en 2015, l’exclusion était principalement de type économique puisque seuls les membres des classes sociales les plus riches pouvaient payer une GPA. Après 2016, l’exclusion économique subsiste mais s’y ajoute une exclusion de type moral dans la mesure où les couples non mariés ou homosexuels n’ont pas accès à la GPA et une exclusion de type familial puisque les gestatrices doivent avoir un lien de parenté avec les parents d’intention. Ainsi l’État s’arroge le contrôle de la procréation et le droit de formation des familles en imposant un modèle familial dit « traditionnel » (couple hétérosexuel marié) et proche du biologique (gestatrice de la même famille) dans une logique conservatrice. Cependant, il délègue entièrement ce contrôle à l’appareil médical qui le partageait, auparavant, avec des intermédiaires non médecins.

  2. La proximité des États-Unis et le développement considérable des infrastructures touristiques, ont joué un rôle de premier plan dans la croissance du marché procréatif de 1997 à 2015. Pourtant, de notre point de vue, le tournant de 2015-2016 ne s’explique pas tant par cette position géopolitique ou par la logique de marché, que par des éléments propres au Mexique comme le sont les conditions économiques, sociales et politiques, notamment les rapports de force entre les groupes de pouvoir locaux, que l’on a présentés dans l’article ainsi que des facteurs culturels spécifiques liés aux représentations de la maternité. En effet, en plus de constituer un « marché », la GPA se trouve au croisement de l’éthique et de la morale. Dans le cas mexicain, l’irruption de la technologie dans l’univers de la maternité a surtout contribué à renforcer le point de vue paternaliste et/ou autoritaire qui fait obstacle à l’exercice de l’autonomie des femmes et des droits reproductifs en général. Dans les médias et dans l’opinion publique, cela s’est exprimé par une victimisation ou une criminalisation des gestatrices. Des facteurs culturels et des systèmes de croyances ont donc joué, plus que les législations ou régulations, en établissant un seuil éthique dans l’exercice de la GPA comme le montre le fait que tous (médecins, gestatrices, parents) évitent de faire coïncider la gestatrice avec la mère génétique. Cela confirme la distance abyssale qu’il y a entre les législations et les systèmes de croyances dans un pays aussi culturellement et ethniquement divers que le Mexique. Le fait qu’entre 2010 et 2016, huit propositions de loi sur la pma ont été soumises, sans succès, à l’Assemblée Législative de Mexico, que la thématique de la GPA n’ait pas été abordée ouvertement par les partis politiques en lice pour les élections de 2018, et qu’en 2020, le statut de la GPA, passé de la non régulation à la restriction de la pratique, reste incertain, reflète non seulement un manque de consensus entre les partis et les factions politiques, mais aussi la méconnaissance que les législateurs ont des facteurs techniques, médicaux, bioéthiques et culturels liés à la GPA. Si le Mexique est devenu, à un moment donné, un Eden de la GPA, c’est parce que la conjoncture politique et les représentations culturelles (de la procréation, de la différence des sexes, des hiérarchies sociales) l’ont rendu possible. Ce qui semble montrer que le déplacement de l’offre de GPA dans le monde aujourd’hui dépend aussi des processus internes de chacun des pays offrants.

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1 Dans cet article, les catégories Nord et Sud n’ont pas de contenu absolu, dans la mesure où les États-Unis, pays emblématique dudit Nord, constituent l’épicentre de la GPA ( Jacobson 2016), et où les classes supérieures des pays du Sud ont la capacité économique suffisante pour accéder à n’importe quelle technique d’assistance médicale à la procréation, dans n’importe quel pays.

2Étudiée depuis les années 1990, cette hypothèse s’appuie sur la théorie de la reproduction stratifiée qui postule que « certaines catégories de personnes sont encouragées ou incitées à se reproduire et à agir comme des parents, alors que d’autres ne le sont pas. Cette théorie suggère que la capacité à contrôler la possibilité de se reproduire est stratifiée selon le genre, l’orientation sexuelle, la race, l’ethnicité, et la classe sociale » (Reid M. et al. 2009, 811).

3Nous entendons par agence des organisations destinées à servir de lien, surtout via internet, entre les gestatrices potentielles et les parents d’intention. Étant donné la relation très étroite entre les cliniques de fertilité et les agences de GPA, nous nous référons à elles comme à des cliniques/agences dont la fonction principale est d’offrir des soins médicaux spécialisés dans la fertilité mais qui ont aussi un programme de GPA.

4Projet Parentescos en el espejo. Diversidad y desigualdad en el contexto mexicano contemporáneo, Conacyt (CB 2014-222366).

5Il peut s’agir de donneuses d’ovules ou de donneuses de travail reproductif (grossesse et accouchement). Dans tous les cas, les donneuses reproductives sont essentielles pour la GPA.

6 Matorras (2005, 85) souligne qu’il est inapproprié de parler de « tourisme procréatif » parce que le terme « tourisme » banalise la question et prédispose négativement les lecteurs face aux problèmes reproductifs.

77300 euros.

8En effet, les gestatrices font partie des 30,7 % de la population mexicaine connectée à Internet (MODUTIH INEGI, 2014).

982 % de la population est catholique (INEGI 2011).

10Par exemple, une affiche représentant un ventre de femme enceinte disait « j’ai loué mon ventre mais le bébé est mort en moi. Et sans bébé, pas de contrat. Tu ne vaux rien. Les femmes ne sont pas un objet qu’on utilise. Ni les bébés une marchandise qui se vend. Ne te laisse pas tromper ! Ne deviens pas victime de la Hashtag EMFR. Informe-toi » (Photographie prise par J. Ortega dans un wagon de la ligne 8 du métro à Mexico 2015).

11Cycle d’analyse ¿Maternidad Subrogada? Análisis y Perspectivas con un enfoque de Derechos Humanos, cdmx, 9 de marzo de 2016

12Tout comme en Inde (Rudrappa 2016).

13Une telle catégorie implique des rapports de rente capitaliste fondés sur l’extraction de biovaleur. Voir Cooper & Waldby (2014) et Nahman, (2013) cités par Whittaker (2016).

14Entretien avec Francisco Galindo, médecin, 2015.

15Vania, rapport de travail de terrain, 2018.

16« Surrogacy in Mexico ». Sensible Surrogacy. http://www.sensiblesurrogacy.com/surrogacy-inmexico/.

17« Surrogacy in Mexico now closed ». Sensible Surrogacy. http://www.sensiblesurrogacy.com/surrogacy-in-mexico-now-closed/.

18Pour plus d’informations, rendez-vous sur : http://www.sensiblesurrogacy.com/surrogacy-inmexico-now-closed/.

Received: February 19, 2019; Accepted: January 07, 2021

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